Attaqué par surprise
Attaques à distance
Arrivé à moins de 35 ans dans le petit cercle des experts que l’on invite en stage, indépendant de tout groupe et avec un franc-parler peu apprécié, j’ai souvent été accueilli dans le monde de l’Aïkido comme un cheveu sur la soupe.
J’ai été peu épargné alors, les mails et coups de téléphones menaçants aux gens intéressés par ma pratique se multipliant. J’ai subi comme Stéphane Benedetti, René VDB, André Cognard, Jaff Raji ou Nébi Vural (liste non-exhaustive !), les manigances de personnes qui, lorsque je les rencontrai par hasard, se confondaient en sourires et témoignages d’amitié.
Si cela m’a peiné, je ne peux pas dire que j’ai été surpris. Je gravitais depuis suffisamment longtemps dans le microcosme Aïki pour savoir que sous des abords conviviaux, les manipulateurs pullulaient. Si l’on en retrouve dans tout groupe humain, et donc toute discipline martiale, l’Aïkido en compte particulièrement beaucoup dans ses rangs. La faute sans doute à une pratique non-compétitive, euphémisée au fil des ans, qui relégua les adeptes engagés dans la pratique au second rang, tandis que les courtisans parvenaient trop souvent aux postes à responsabilité, et recevaient des grades qui n’avaient de rapport qu’avec leurs talents de flagorneurs.
Oh les attaques à distance que j’ai subies n’ont pas eu grand effet, et aujourd’hui le Kishinkaï est pratiqué sur tous les continents habités ! Mais si j’en rigole aujourd’hui, ces nuisances m’ont souvent fâché par leur lâcheté et leur mesquinerie.
Test IRL (In Real Life)
En contrepoint de l’absence de courage qui sous-tend ces actions, j’ai été amené régulièrement dans mon parcours à faire face à des tests concrets. Les formes ont été variées, mais les plus fréquentes ont été des attaques très, très engagées, des tentatives de blocage, ou plus rare, des retournements de techniques.
Je me souviens notamment de deux stages. L’un où le uke que j’avais amené au sol m’a attiré à lui alors que je m’étais retourné pour donner des explications, et l’autre où aïte m’a soulevé de terre en me ceinturant par derrière alors que je lui montrai une erreur qu’il commettait. L’un a fini recroquevillé et contrôlé, et l’autre avec une clé de cervicales. J’avoue que si j’ai toujours réussi à retourner les situation à mon avantage, j’ai ainsi plusieurs fois été pris totalement au dépourvu.
Bien entendu je suis devenu plus prudent, mais il n’en reste pas moins que ma présence n’est pas constante. Et que durant les milliers d’heures que je passe sur les tatamis chaque année, en particulier lorsque j’enseigne, les ouvertures ne peuvent probablement plus se compter. Il reste toutefois que le pratiquant qui teste ainsi, présente peu de danger. D’une part parce que ses actions sont généralement bon enfant, et d’autre part parce qu’un adepte de haut niveau sait percevoir si un mouvement est juste ou pas, et se situer par rapport à un autre sans avoir besoin de ce type de confirmation.
« Ta technique ne marche pas »
« Ton mouvement ne fonctionne pas, ce n’est pas comme ça qu’on fait cette technique. ». Si l’accueil à mon arrivée en Ukraine fut chaleureux, c’est d’une façon assez abrupte que j’ai été abordé par certains sur le tatami. Mais on ne peut pas être surpris que des pratiquants soient intéressés par l’aspect martial de la discipline lorsque leur pays vit un conflit larvé qui a déjà fait 13 000 victimes en cinq ans. Cela a eu le mérite d’être franc, et finalement ces adeptes ont été enchantés lorsque j’ai pu leur montrer l’efficacité du relâchement.
Léo Tamaki à Odessa, 9 et 10 novembre