Budo no Nayami

L'enfance de Ueshiba Moriheï

23 Septembre 2020 , Rédigé par Léo Tamaki

Dans quel monde naquit, grandit, et forma son caractère Ueshiba Moriheï ? Connaître le contexte culturel, social et historique dans lequel est né une tradition permet d'en comprendre ses ressorts. Découvrir le monde dans lequel naquit le Fondateur nous donne ainsi de précieuses informations sur la nature de l'Aïkido.

 

 

Médecin de province, Saga Junichi commence à enregistrer les souvenirs de ses patients dans les années soixante-dix. "Mémoires de paille et de soie" présente une sélection de ces récits recueillis pendant dix-sept ans. Tour à tour drôles, tragiques, émouvants, ils dépeignent le Japon médiéval dans lequel se forma la personnalité du Fondateur. Un Japon âpre, dur mais élégant, qui nous invite à nous questionner sur sa création.

Car nul doute que l'Aïkido doive évoluer, que la pratique d'hier ne peut être celle d'aujourd'hui. Mais quelle était la direction initiale, quel esprit habitait la pratique à sa naissance ? Voici quelques extraits de "Mémoires de paille et de soie" qui, je l'espère, vous donneront envie de vous plonger dans l'ouvrage.

 

"Mon grand-père était le bourreau public. C'était un homme énorme à l'air terrible – les gens ne s'approchaient pas de lui. Quand j'étais petit il avait déjà plus de quatre-vingts ans et avait déjà pris sa retraite depuis longtemps.

Grand-père était aussi passé maître dans une autre arme, la faucille et la chaîne. Le but était de faire tomber le sabre de l'adversaire avec la chaîne et de lui couper la tête avec la faucille. Grand-père faisait tournoyer autour de sa tête la chaîne qui faisait bien trois ou quatre mètres de long pour empêcher son adversaire de s'approcher de lui. Vous n'auriez jamais cru que c'était un vieillard de quatre-vingts ans, il avait l'air tellement féroce. Il organisait parfois un combat avec le maître d'armes local et les gens se rassemblaient pour regarder.

Il restait encore beaucoup d'anciens samouraïs quand j'étais gosse – rien ne leur plaisait autant que d'assister à un bon duel.

En général, autrefois, on coupait la tête des criminels. Le bourreau se tenait juste derrière le prisonnier, regardait bien le cou du condamné, et abattait son sabre d'un seul coup. Grand-père m'a dit qu'il fallait faire bien attention à couper entre les os du cou, sinon le sabre ne passait pas jusqu'au bout et le condamné restait avec sa tête à moitié coupée, hurlant de douleur. il paraît que les criminels demandaient que ce soit quelqu'un capable de tuer d'un seul coup. Et mon grand-père avait une bonne réputation, à ce qu'il paraît. Il pouvait même couper la tête d'un prisonnier en train de s'échapper. Ce n'était pas vraiment permis, il m'a dit, mais il le faisait de temps en temps pour tester sa technique."

M. Takagi Fukusaburo (1898 – 1981)

 

 

"Nous avions une brocante. Autrefois, c'était un métier qui rapportait bien, parce que, après l'abolition des domaines féodaux en 1868, les seigneurs et les samouraïs avaient du mal à joindre les deux bouts et vendaient leurs biens de famille : des sabres, des armures, des lances et des peintures en rouleau."

Mme. Ono Shige (1899 – 1983)

 

"Mais les leçons les plus sévères étaient celles concernant le comportement correct d'une geisha : attitude envers les supérieurs, attitude vis-à-vis des clients, façon correcte de parler.

On me répétait à longueur de temps que le travail d'une geisha n'était pas seulement de distaire les clients et de les amuser – une prostituée pouvait en faire autant. Non, une geisha devait être une artiste, et y consacrer sa vie (…)

À cette époque, cela prenait des années d'exercices et d'efforts pour devenir une geisha digne de ce nom ; c'est pour cela que l'atmosphère dans une soirée de geishas était très différente de ce qu'elle est aujourd'hui. Mais quand j'y réfléchis, je me demande vraiment si la formation sévère donnée à tout le monde autrefois était vraiment une bonne chose.

Mais cela dit, quand je vois le genre de manières négligées et l'attitude non professionnelle de la plupart des geishas d'aujourd'hui, je suis toujours atterrée.

Je suis frappée par le fait que le juste milieu soit toujours si difficile à trouver : en d'autres termes, une formation qui ne soit pas stricte au point d'étouffer la personnalité, mais pas non plus lâche au point d'encourager la négligence."

Mme. Nakazawa Sui (1909 - )

 

 

"(…) elle avait donné naissance au bébé toute seule dans la montagne, en avait coupé le cordon ombilical avec sa faucille, et l'avait rapporté sur huit ou dix kilomètres jusqu'à la maison. Elle ne voulait pas laisser tout le bois de chauffage qu'elle avait rassemblé, au cas où quelqu'un le lui prendrait, alors elle l'avait transporté en même temps sur son dos."

Mme. Terakadao Tai (1899 - )

 

 

À la lumière de cet ouvrage, ma conviction que l'Aïkido s'est égaré s'est trouvée renforcée.

Oh le monde d'avant n'était pas meilleur. Et je le répète, pour continuer à remplir sa mission, une tradition ne survit qu'en évoluant, tant dans le fond que la forme. Mais je considère l'Aïkido comme une méthode d'auto-éducation née dans un monde rugueux. Un vernis de bien-pensance et politiquement correct sur une pratique tiède ne sauraient prétendre à poursuivre l'ascèse de nos prédécesseurs. Nos aînés nous ont montré l'exemple en dédiant une part de leur vie à l'Aïkido dans le but de se parfaire. Sans naïveté et sans concession, ils ont forgé leur corps et leur âme. Il revient à chacun d'entre nous de faire preuve de la même exigence et sincérité pour que l'Aïkido fleurisse à nouveau.

 

Ueshiba Moriheï dans sa jeunesse

 

Forger son corps et son âme

Je serai cette semaine au Renshinkan pour trois jours de pratique. Cette ancienne forge devenue dojo est le lieu idéal pour insuffler du cœur à notre pratique !

 

Le premier caractère, , vient de tanren 鍛錬, forger (le dojo est bâti dans une authentique forge).

Le second, , shin, est le cœur, kokoro.

Le troisième, , kan, signifie maison, petit château.

 

La symbolique de ces caractères permet de nombreuses interprétations, mais nul ne saurait mieux parler du Renshinkan 錬心館 que son fondateur, Simon Pujol :

 

"Avec le Cœur car je pense que tout vient de là.

… Les promesses de méthodes, livres et autres professeurs ventant un moyen rapide d'avoir des résultats ne sont que chimères, seuls ceux qui s'entrainent beaucoup avec intelligence vont loin.

Le Cœur, au sens large du terme, permet de toujours faire les choses de manière positive, de donner du sens à ce que l'on fait mais aussi d'aller plus loin encore."

 

 

Léo Tamaki à Albi, 25 au 27 septembre

 

Horaires

Vendredi 25, de 19h30 à 21h30

Samedi 26, de 09h00 à 11h30, et de 14h00 à 16h30

Dimanche 27, 09h30 à 12h00

 

Lieu

Renshinkan

Passage Valentin Haüy

81000 Albi

 

Tarifs

Stage complet 55€

2 cours 40€

1 cours 25€

 

Contact

simon.pujol@hotmail.fr

Tel 06 99 14 31 27

 

Stage ouvert à tous les pratiquants d'arts martiaux, tous groupes, et tous niveaux.

 

 

 

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D
Il est vrai que l'enseignement des sensei dans les temps anciens avait plus de sens pour les élèves. Heureusement qu'il existe des sensei comme vous, qui ont gardé cette rigueur d'antan.<br /> Laurent De Cillis
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L
Merci Lorenzo :-)<br /> <br /> Léo
J
Un film japonais qui m'a beaucoup ému sur la fin d'une époque est Quand la dernière épée est tirée( when the last sword is drawn) réalisateur Yôjirô Takita acteur principal Kiichi Nakai ..On apprend jamais des leçons du passée..
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L
Ah si je l'avais vu, excellent film !<br /> <br /> Léo
L
Merci pour le titre que je ne connaissais pas :-)<br /> <br /> Léo
J
j'aime beaucoup vos articles en particulier celui là car il explique bien la différence entre la vie d'avant,je suis né il y a soixante ans et la vie de maintenant .la vie y était plus dur mais l'apprentissage y etait meilleur.Comme on dit dans l'armée, la sueur epargne le sang
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L
Merci pour votre témoignage :-)<br /> <br /> Léo