Message (officiel?) de Patrick Loterman pour la KIIA, réponse personnelle de Léo Tamaki
J'ai reçu ce matin un message écrit au nom de la KIIA. Ce message a été envoyé délibérément sur le blog en commentaire public, aussi j'y réponds publiquement.
Cher monsieur,
Votre message est insultant et mesquin à tant de niveaux que, je vous l'avoue, il m'a littéralement fait rire.
"Mandaté par la KIIA (kinomichi instructors international association), je suis chargé de vous faire part de l’étonnement de tous les instructeurs (à ce jour 101) de n’avoir pas été contacté pour cet hommage que vous allez rendre à notre Maitre Masamichi Noro le samedi 18 mai 2013."
Je suis heureux de faire l'objet de tant d'attention. 101 dites-vous, quel beau chiffre. Un peu maigre pourrait-on souligner, mais je suis certain que ce n'est pas par manque d'initiatives diverses de la KIIA, mais par souci de qualité.
101 enseignants ont donc été étonnés et ont souhaité que vous les représentiez. Suivant tous mon blog quotidiennement, ils ont dans un élan commun pris, qui leurs plumes, qui leurs claviers, pour s'indigner auprès de votre direction. J'en prends note.
Je vous avoue que je suis surpris que cette démarche si officielle n'ait pas été réalisée par Mr Hubert Thomas qui a déjà laissé plusieurs commentaires sur le blog, mais sans doute a-t-il réalisé que cela risquerait de le mettre en posture délicate. C'est donc vous, passionaria de la KIIA, qui avez été mandaté.
"Le seul à vos yeux capable de le représenter et qui figure dans votre programme est Takeharu Noro qui n’a jamais été l’élève de son père mais de ses disciples dont le plus ancien additionne cinquante années de compagnonnage et pour les moins anciens dont je fais partie trente quatre années."
Ah, nous rentrons dans le vif du sujet. Je vous invite à ne pas essayer de deviner mes intentions. Nous ne nous connaissons pas, et j'ai la prétention de dire que ce n'est pas à la lecture de quelques posts que vous pouvez comprendre le fond de ma pensée. Donc non, Noro Takeharu n'est en aucun cas le seul à pouvoir représenter le Kinomichi. Mais c'est celui que j'ai choisi.
Takeharu a-t-il été élève de son père? A mes yeux oui. Permettez-moi toutefois de vous préciser que, cela n'aurait-il pas été le cas, qu'il n'en aurait pas été moins qualifié à mes yeux. Car s'il était nécessaire d'avoir été élève du Fondateur d'une discipline pour la représenter, alors les démonstrations d'Aïkido seraient comptées.
Takeharu a-t-il suivi des cours avec son père. C'est ce que l'on m'a dit, et je n'ai aucune raison de remettre cela en doute. Mais cela n'est même pas au cœur de la question pour moi. On dit qu'un élève apprend à devenir, être le maître qu'il suit. C'est le principe des uchi-deshis qui, comme Noro senseï, ne recevaient pas d'entraînement particulier, même s'ils pouvaient être occasionnellement les partenaires du maître lors de ses recherches. En revanche ils apprenaient au contact quotidien ce qu'était réellement un budoka. C'est ce qu'ont appris les maîtres Tamura, Noro, Yamada, Saotome et leurs compagnons. Auprès de maître Ueshiba ils ont appris la valeur de la discrétion, l'élégance, l'importance de vivre chaque instant intensément, de répandre la joie. Ce sont des qualités qu'incarnait maître Noro, des qualités qui me semblent présentes chez Takeharu, mais qui apparraissent totalement absentes de votre démarche et votre courrier.
"Takeharu Noro ne peut se prévaloir que de trois ou quatre années de pratique et si nous lui reconnaissons une certaine habileté et du sérieux dans son engagement il est très loin d’être le meilleur représentant ou porte parole de l’art de son père à moins de considérer que génétiquement il puisse avoir acquis de l’expérience."
Permettez-moi, comme vous reconnaissez à Takeharu une certaine habileté en Kinomichi, de reconnaître en vous un talent dans l'insulte voilée, le dénigrement en quelques mots. C'est remarquable, un talent trop souvent utile en société.
Il y aurait donc un "meilleur représentant" du Kinomichi. J'ai hâte de la connaître. N'oubliez pas de m'envoyer ses coordonnées que j'aille observer cet adepte admirable. Qu'est le Kinomichi? Après les heures passées en compagnie de Noro senseï, l'image que je m'en suis faite est celle d'une discipline amenant l'homme à grandir, s'élever, se libérer. La technique y est un outil mais en aucun cas un but. Faisant un parallèle avec le zen, j'ai la conviction que ses résultats peuvent être très rapides pour certains, tandis que pour d'autres acrobates du zazen, ils ne seront jamais au rendez-vous.
"Sachez que certains de nos instructeurs étaient déjà élèves d’aikido dans les années soixante auprès de notre maître, qu’ils sont les témoins par leur pratique du cheminement et de la recherche ayant abouti au kinomichi. Leur fidélité étonnante devrait imposer à d’autres que vous avez choisis d’inviter et se prévalant d’une certaine proximité un minimum de réserve ou de silence."
C'est impressionnant, et j'en suis heureux pour eux. Je suppose qu'en parlant des "autres que (j'ai) choisis d'inviter", vous pensez à Daniel Toutain et Raymond Bisch? N'ayant pas peur de les mentionner voyons, vos insultes sont transparentes, assumez-les.
J'ai, MOI, demandé à messieurs Toutain et Bisch d'être présents, car je les apprécie, tant sur le plan humain que technique. Parce qu'ils ont eu une proximité que peu ont eu avec maître Noro. Parce qu'ils représentent une période de la vie de ce maître d'exception, et que ce sont des instantanés de plusieurs périodes que je souhaitais présenter au public. Ne leur conseillez pas le silence car ils font honneur au maître qu'ils n'ont jamais cessé de révérer même si leurs parcours les en ont éloignés, tandis que vous qui avez gravité si longtemps dans son ombre, ne faites que le déshonorer par votre misérable courrier.
"Selon Maitre Masamichi Noro le respect des anciens est la pierre angulaire et le fondement de son enseignement. Il est regrettable qu’à peine un mois après son décès on lui rende hommage en enfreignant une des règles principales de son éthique qu’il n’a cessé année après année de nous dispenser. Nous pouvons vous assurer que Maitre Masamichi Noro aurait été offensé qu’une initiative telle que la votre se réalise sans que ses plus fidèles disciples et amis en soit en premier lieu averti : son exigence du protocole était légendaire."
Ah, faire parler les morts, quel exercice à la mode actuellement. Rejoignez la FFAB, vous y trouverez actuellement plus d'adeptes de cette pratique qu'à la FFAAA. Quoique je sois persuadé que ce soit surtout l'occasion qui fasse le larron.
Vous insinuez donc que je n'ai pas le respect des anciens. Question de point de vue je suppose. J'ai toujours eu à cœur de recueillir les paroles des maîtres d'exception dont je croisais le chemin. Pour mon bénéfice personnel bien entendu, mais aussi pour celui des pratiquants qui, en lisant leurs réflexions, ont ainsi matière à nourrir les leurs. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai fait la connaissance de Noro senseï.
Je ne vous permets pas de dire que maître Noro aurait été offensé par ma démarche. Ne parlez pas en son nom pour essayer de culpabiliser qui que ce soit. J'ai déjà, il y a deux ans, organisé une soirée en son hommage. Il était là et a assisté avec bienveillance à tous les préparatifs. Sa santé déclinante et une hospitalisation l'ont empêché d'être physiquement présent ce soir-là, mais il avait plus qu'acté la présence de son fils, il l'avait encouragé et rassuré. Et JAMAIS il n'a paru offensé que je ne contacte pas la KIIA. C'est à cette époque Odyle et Takeharu qui m'ont demandé d'ouvrir la démonstration à d'autres qui auraient eu plaisir à célébrer leur maître. Je l'ai fait avec plaisir à cette occasion. Occasion pour laquelle je ne reçu d'ailleurs aucune réclamation sur le fait que x ou y n'ait pas été averti en premier, mais de nombreux remerciements des enseignants présents. Cette année j'ai fait le choix de limiter les intervenants car si la soirée est dédiée à Noro senseï, elle ne tourne pas uniquement autour de lui. C'est un choix personnel que j'assume pleinement. Sans doute l'affiche vous a-t-elle induit en erreur, et là, je peux parfaitement le comprendre. J'ai beaucoup hésité car nous étions au départ parti sur une autre communication. Simplement j'aurai trouvé inélégant de simplement mentionner le nom de Noro senseï dans un coin de l'affiche.
Quant à son exigence du protocole, elle était variable. Maître Noro avait une intelligence du cœur, un charisme hors du commun, et une personnalité unique. Ces qualités lui permettaient de dynamiter les règles lorsqu'il le souhaitait, et il m'a confié de nombreuses anecdotes hilarantes à ce sujet.
Permettez-moi à mon tour de supposer ce qu'auraient pu être ses pensées à la lecture de votre courrier. Dégoût et mépris.
Dégoût de voir une occasion de célébrer un maître souillée par des pensées mesquines.
Choc de voir que son fils n'est pas jugé digne de représenter le Kinomichi alors qu'il l'en avait lui-même estimé capable.
Mépris de voir qu'une telle démarche, (si elle avait dénotée une véritable surprise et non pas une amertume de ne pas être sur l'affiche), n'ait pas eu lieu en privé.
Puisque vous semblez si attaché au protocole, laissez-moi vous dire à quel point votre démarche va à l'encontre total de la culture de votre maître. Lorsque le fondateur d'une école décède, il est commun que ses élèves se réunissent et soutiennent les descendants qui prennent sa suite. Ils ne sont pas toujours les plus brillants techniquement, mais ils représentent bien plus qu'une habileté, un esprit. Si vous avez à cœur de suivre la tradition, vous vous réunirez avec les enseignants de la KIIA pour soutenir le fils de votre maître, et le nourrir de vos conseils et enseignements. Avec humilité, dans l'ombre, et sans chercher à occuper le haut de l'affiche. Lui permettant de progresser, vous renforcerez le Kinomichi.
J'ai non seulement entendu mais ENREGISTRE Noro senseï inviter son fils à aller pratiquer avec Asaï senseï. Ce qu'il fait depuis le début de cette année. C'est lui que j'aurai invité si je voulais avoir le "meilleur" représentant du travail de maître Noro. C'est mon avis subjectif. L'agenda d'un tel maître étant bloqué sur des saisons entières, ce n'était évidemment pas possible compte tenu des délais.
Takeharu n'est pas encore un maître. Il n'appartient qu'à lui de le devenir. Mais il a des qualités qui peuvent lui laisser espérer une telle évolution. Je pense à son charisme, son élégance, et son humilité. Je vous invite à lire cette anecdote dont j'ai été témoin. Non Takeharu n'a pas besoin de mettre en avant un nom, une proximité ou des années de pratique. Lorsqu'il présente le Kinomichi il en démontre l'essence, joie, ouverture, simplicité. De grands adeptes ne s'y sont pas trompés qui m'ont parlé de lui en termes flatteurs.
Takeharu a vécu toute sa vie auprès de maître Noro. Il a en outre passé un temps phénoménal avec lui ces dernières années, car il était le seul enfant disposant de beaucoup de temps pour s'occuper de son père. Maître Noro ne pouvait plus se concentrer sur la technique, mais l'essentiel a été transmis. Quelque chose à côté duquel vous semblez être passé malgré vos décennies de pratique.
"Nous tenons à vous remercier de l’intérêt que vous témoignez pour la création de notre maître et sommes touchés par votre démarche. Pour vous parler du kinomichi , de sa genèse, de son futur et pour répondre à votre curiosité sincère nous sommes tous à votre disposition . L’association KIIA a été créée pour garantir (entre autre) la pérennité de l’esprit du kinomichi et garantir le respect de ses principes moraux : elle a été voulue par Maitre Masamichi Noro : ne pas la respecter revient à ne pas respecter Maitre Masamichi Noro."
N'essayez pas, je vous le disais, de pénétrer mes pensées. Si j'ai le plus grand respect pour le Kinomichi, ce n'est pas une voie qui m'intéresse aujourd'hui. J'étais passionné par maître Noro, son parcours, sa vie. Et si je n'ai jamais été son élève, je peux vous assurer qu'il est un de mes maîtres.
Si les groupes et organisations sont inévitables, je ne leur porte aucun intérêt. Maître Noro m'a répété à plusieurs reprises à quel point il était allergique aux règlements et autres fédérations, même s'il était obligé de s'en accommoder. S'il ne fait aucun doute qu'il avait de l'affection pour certains de ses élèves, mon opinion est qu'il n'avait aucun attachement à quelque organisation que ce soit.
En conclusion je trouve votre démarche méprisable, et n'attend ni ne souhaite aucune réponse de vous. Je vous invite toutefois à vous excuser auprès de Noro Takeharu, Daniel Toutain et Raymond Bisch que vous avez souhaité insulter publiquement.
"En attendant votre réponse, soyez assuré de toute notre sympathie.
Patrick Loterman pour la KIIA"
Je ne vous salue pas.
Léo Tamaki, en mon nom propre