Do, jutsu, senseï… limites et subjectivité de la définition
Réponse à un commentaire de Mat. à la suite des articles "Budo, l'attitude des maîtres au quotidien.", "Budo, l'attitude des maîtres au quotidien. Commentaires." et "L'art martial du côté artistique.".
"Je ne suis pas d'accord avec la confusion que tu fais entre la dichotomie jutsu / do et l'interpénétration du jutsu et du do dans les arts martiaux.
Pour moi l'outil = "jutsu" est bien évidemment au service de l'objectif = "do"."
Jusqu'à présent j'ai toujours essayé de clarifier les choses en expliquant les différences entre jutsu et do. Cela amène inévitablement son lot de généralisations.
Quelles sont les différences entre bujutsu et budo? Je crois que l'on pourrait remplir des volumes sans parvenir à une réponse satisfaisante et, en conséquence, ma réponse ne pourra encore être qu'insatisfaisante.
Le premier problème est de vouloir définir les choses de façon limitatives. Qu'est ce que l'Aïkido? Qu'est-ce que l'amour? Qu'est-ce que le sucré?
Définir implique des choix. Cela sous-entend aussi que l'on connaît les limites de son sujet. Par ailleurs pour définir un mot nous en utilisons d'autres qui encore une fois n'ont peut-être pas le même sens selon notre vécu…
La principale différence entre les bujutsu et les budo tient au fait que les premiers étaient pratiqués à une époque où ils gardaient un aspect pratique et utilitaire. La pratique se devait donc d'être utilisable dans une situation concrète. Est-ce que pour autant ce n'était pas aussi une méthode d'éducation? Je ne le crois pas. Et les écrits de Musashi ou de Yagyu nous laissent percevoir qu'au delà de leur aspect pratique les bujutsu étaient déjà considérés comme une voie.
Quel est le but du budo? L'éducation de l'homme. Quand un homme est-il réalisé? Y-a-t-il un point où la pratique n'est plus nécessaire? La pratique n'est-elle pas la voie?
Le bujutsuka et le budoka pratiquent. Leur pratique ne connaît pas de fin. Elle doit se faire de façon désintéressée, l'esprit libre, vide et sans attentes (mushin). Pour moi la pratique est donc la voie…
Le seul luxe est que le budoka n'a pas besoin que ses techniques marchent. Mais pratiquer sans cohérence martiale fait perdre son sens à la pratique. En revanche, le budoka peut se permettre d'ajouter une dimension éthique. Maintenant savoir si cette dimension éthique ne nous fait pas rentrer dans un monde dualiste, à l'opposé du do (dans le sens de tao/dao)…
"Mais peu importe la traduction plus ou moins littérale que je fais de ces deux mots japonais. Ce qui importe c'est la définition du mot "maître" et la personnalité de ceux qu'on peut qualifier comme tel."
Malheureusement non, le point principal tient aux limites d'une définition. Tout d'abord pour toi quel mot japonais traduit maître? Senseï? Shihan? Shidoshi? Shisho? Renshi? Kyoshi? Hanshi? Tous ces mots et probablement d'autres qui ne me viennent pas à l'esprit pourraient être traduits par maître.
De la même manière en français les mots enseignant, professeur, expert, maître, instructeur, entraîneur... signifient pas la même chose. C'est là la difficulté de traduire des mots qui parfois n'ont pas d'équivalent.
"Un maître, ça maîtrise, non ?"
Oui.
"Celui qui maîtrise l'outil est déjà un maître. Que tu l'appelles "expert" n'y changera rien :D. La maîtrise d'un outil est quelque chose de plus facile à objectiver en tous cas que la maîtrise dans une ou l'autre voie, surtout lorsqu'il s'agit de "réalisation personnelle" !"
Celui qui maîtrise sa voiture est de ce point de vue là aussi un maître. Mais dans le monde des arts martiaux, et d'ailleurs même au-delà, le mot maître a acquis une connotation spirituelle. Il ne te viendrait pas à l'esprit d'appeler Michael Schumacher maître. Ou John Mc Enroe. Ou Zidane. Même si ce sont des maîtres dans leurs domaines. La différence entre expert et maître est justement que le premier terme n'a pas de connotation spirituelle et reste du domaine technique, du domaine donc de l'utilisation de l'outil.
Quand à la difficulté d'objectiver la réalisation personnelle c'est une évidence, cela ne peut-être que subjectif.
"Effectivement, celui qui semble être "avancé" sur une voie peut aussi être appelé un maître. C'est d'autant plus vrai lorsque l'avancée sur cette voie a nécessité la maîtrise préalable des divers outils de progression. Mais ce n'est qu'un autre niveau de maîtrise, voire une maîtrise dans un domaine différent."
Celui qui est avancé sur une voie doit, à mon sens, être appelé maître. L'appeler expert ne transmettrait pas complètement l'idée que je m'en fais.
"D'ailleurs s'agissant de "réalisation personnelle", les "voies" sont aussi multiples que les individus. Toutes n'interprètent pas l'équilibre de la même façon que celle que tu nous présentes. C'est ce que j'ai essayé de traduire dans ma réponse à Ivan."
Tout à fait, la réalisation personnelle recouvre des domaines qui sont aussi multiples que les individus. Les définitions que j'en donne sont donc totalement subjectives ;-)
Quand à Ivan je ne peux répondre à sa place mais je suppose que lorsqu'il parlait de voie du milieu il faisait sans doute référence au bouddhisme.
"Vu sous cet angle, je comprends que ta définition du maître est sur le fond un aveu de ta part sur ce qui constitue pour toi la réalisation personnelle ;-)."
Tout à fait.
"... dans le cadre du budo, bien entendu ;-) "
C'est par là que passe pour moi la réalisation personnelle ;-)
"Je ne suis pas d'accord avec la confusion que tu fais entre la dichotomie jutsu / do et l'interpénétration du jutsu et du do dans les arts martiaux.
Pour moi l'outil = "jutsu" est bien évidemment au service de l'objectif = "do"."
Jusqu'à présent j'ai toujours essayé de clarifier les choses en expliquant les différences entre jutsu et do. Cela amène inévitablement son lot de généralisations.
Quelles sont les différences entre bujutsu et budo? Je crois que l'on pourrait remplir des volumes sans parvenir à une réponse satisfaisante et, en conséquence, ma réponse ne pourra encore être qu'insatisfaisante.
Le premier problème est de vouloir définir les choses de façon limitatives. Qu'est ce que l'Aïkido? Qu'est-ce que l'amour? Qu'est-ce que le sucré?
Définir implique des choix. Cela sous-entend aussi que l'on connaît les limites de son sujet. Par ailleurs pour définir un mot nous en utilisons d'autres qui encore une fois n'ont peut-être pas le même sens selon notre vécu…
Qu'est-ce que l'Aïkido?
La principale différence entre les bujutsu et les budo tient au fait que les premiers étaient pratiqués à une époque où ils gardaient un aspect pratique et utilitaire. La pratique se devait donc d'être utilisable dans une situation concrète. Est-ce que pour autant ce n'était pas aussi une méthode d'éducation? Je ne le crois pas. Et les écrits de Musashi ou de Yagyu nous laissent percevoir qu'au delà de leur aspect pratique les bujutsu étaient déjà considérés comme une voie.
Pratiquant d'une technique ou d'une voie?
Quel est le but du budo? L'éducation de l'homme. Quand un homme est-il réalisé? Y-a-t-il un point où la pratique n'est plus nécessaire? La pratique n'est-elle pas la voie?
Le bujutsuka et le budoka pratiquent. Leur pratique ne connaît pas de fin. Elle doit se faire de façon désintéressée, l'esprit libre, vide et sans attentes (mushin). Pour moi la pratique est donc la voie…
Le seul luxe est que le budoka n'a pas besoin que ses techniques marchent. Mais pratiquer sans cohérence martiale fait perdre son sens à la pratique. En revanche, le budoka peut se permettre d'ajouter une dimension éthique. Maintenant savoir si cette dimension éthique ne nous fait pas rentrer dans un monde dualiste, à l'opposé du do (dans le sens de tao/dao)…
"Mais peu importe la traduction plus ou moins littérale que je fais de ces deux mots japonais. Ce qui importe c'est la définition du mot "maître" et la personnalité de ceux qu'on peut qualifier comme tel."
Malheureusement non, le point principal tient aux limites d'une définition. Tout d'abord pour toi quel mot japonais traduit maître? Senseï? Shihan? Shidoshi? Shisho? Renshi? Kyoshi? Hanshi? Tous ces mots et probablement d'autres qui ne me viennent pas à l'esprit pourraient être traduits par maître.
De la même manière en français les mots enseignant, professeur, expert, maître, instructeur, entraîneur... signifient pas la même chose. C'est là la difficulté de traduire des mots qui parfois n'ont pas d'équivalent.
Shihan, senseï.
Professeur? Maître? Expert? Instructeur? Enseignant? Entraîneur?
Professeur? Maître? Expert? Instructeur? Enseignant? Entraîneur?
"Un maître, ça maîtrise, non ?"
Oui.
"Celui qui maîtrise l'outil est déjà un maître. Que tu l'appelles "expert" n'y changera rien :D. La maîtrise d'un outil est quelque chose de plus facile à objectiver en tous cas que la maîtrise dans une ou l'autre voie, surtout lorsqu'il s'agit de "réalisation personnelle" !"
Celui qui maîtrise sa voiture est de ce point de vue là aussi un maître. Mais dans le monde des arts martiaux, et d'ailleurs même au-delà, le mot maître a acquis une connotation spirituelle. Il ne te viendrait pas à l'esprit d'appeler Michael Schumacher maître. Ou John Mc Enroe. Ou Zidane. Même si ce sont des maîtres dans leurs domaines. La différence entre expert et maître est justement que le premier terme n'a pas de connotation spirituelle et reste du domaine technique, du domaine donc de l'utilisation de l'outil.
Quand à la difficulté d'objectiver la réalisation personnelle c'est une évidence, cela ne peut-être que subjectif.
Maître
Expert
"Effectivement, celui qui semble être "avancé" sur une voie peut aussi être appelé un maître. C'est d'autant plus vrai lorsque l'avancée sur cette voie a nécessité la maîtrise préalable des divers outils de progression. Mais ce n'est qu'un autre niveau de maîtrise, voire une maîtrise dans un domaine différent."
Celui qui est avancé sur une voie doit, à mon sens, être appelé maître. L'appeler expert ne transmettrait pas complètement l'idée que je m'en fais.
Maître
Expert
"D'ailleurs s'agissant de "réalisation personnelle", les "voies" sont aussi multiples que les individus. Toutes n'interprètent pas l'équilibre de la même façon que celle que tu nous présentes. C'est ce que j'ai essayé de traduire dans ma réponse à Ivan."
Tout à fait, la réalisation personnelle recouvre des domaines qui sont aussi multiples que les individus. Les définitions que j'en donne sont donc totalement subjectives ;-)
Quand à Ivan je ne peux répondre à sa place mais je suppose que lorsqu'il parlait de voie du milieu il faisait sans doute référence au bouddhisme.
"Vu sous cet angle, je comprends que ta définition du maître est sur le fond un aveu de ta part sur ce qui constitue pour toi la réalisation personnelle ;-)."
Tout à fait.
"... dans le cadre du budo, bien entendu ;-) "
C'est par là que passe pour moi la réalisation personnelle ;-)
Maître Ueshiba
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