Spécial Aïkido n°12 : "Aikiken, le sabre de l'Aikido"
Editorial
Le sabre est-il nécessaire à la compréhension de l'Aïkido ? Est-il un élément indissociable ou simplement un outil pour illustrer occasionnellement le riaï ?
Tamura senseï avait mis le travail du sabre au cœur de sa pratique, et cela transparaissait même lors de son travail à mains nues. Il se passionnait d'ailleurs pour le travail du Shinbukan de maître Kuroda, et en pratiquait les formes en solitaire pour nourrir sa réflexion et sa pratique. Influencé par cela, c'est tout naturellement que je donne aussi une importance à ce travail. J'ai toutefois rencontré de nombreux maîtres qui avaient des conceptions différentes, et qui avaient atteint comme leurs élèves un niveau exceptionnel.
Je ne crois pas qu'il y ait de vérité absolue sur le sujet, et je suis certain que tous les arguments sont riches d'enseignements. Dans ce numéro vous lirez les réflexions d'experts de nombreux courants qui sont aussi partagés sur ce sujet. Je suis persuadé que lire leurs arguments vous apprendra beaucoup, et vous permettra de faire un choix éclairé.
Je termine en partageant avec vous les paroles de quelques géants…
Quelle est l'importance des armes dans votre enseignement ?
Je ne mets pas l'accent sur ce travail. Mais les outils sont là. Il y a des armes au dojo pour les élèves s'ils veulent travailler cet aspect. Lorsque j'étais uchi-deshi et qu'Osenseï nous voyait pratiquer aux armes, il se mettait en colère après nous. Il disait "Pourquoi pensez-vous que j'ai inventé l'Aïkido pour vous !". (…) Je connais les mouvements d'Aïkido et je n'ai aucune difficulté à travailler au sabre. Ce devrait être ainsi pour tous je crois.
En Aïkido le travail des armes est-il important ?
C’est Osenseï qui a créé l’Aïkido. Et à chaque fois qu’il démontrait l’Aïkido il utilisait les armes. Ce n’est pas à nous, ses disciples et élèves, de décider ou pas si il faut pratiquer les armes.
La pratique des armes est donc indispensable en Aïkido ?
L'Aïkido est né de la pratique des armes et le Taïjutsu et les bukiwaza ne font qu'un. Si quelqu'un maîtrise le travail à mains nues juste il utilisera alors les armes correctement. Et vice-versa.
Y avait-il des cours d'armes au Hombu dojo dans le passé ?
Non, il n'y en avait pas. (…) C'est pourquoi les gens de ma génération ont simplement pris des armes et pratiqué comme il leur convenait. (…) Maître Ueshiba utilisait seulement les armes pour illustrer certains principes.
Est-ce que vous considérez que le travail des armes fait partie intégrante de la pratique de l’Aïkido ?
Fondamentalement, non. (…) Les armes ça peut en faire partie mais on peut très bien avoir quelqu’un qui n’a jamais fait de ken de sa vie et qui fait de l’Aïkido correct avec exactement les mêmes sensations.
Le travail du sabre est-il important ?
On peut utiliser le sabre en démonstration pour mettre en évidence un point particulier mais fondamentalement c'est la même chose qu'à mains nues et il n'est pas nécessaire de faire un entrainement spécifique.
Osenseï enseignait-il le travail des armes ?
Non il ne l'enseignait pas. Il n'enseignait que le Taïjutsu. En privé toutefois nous travaillions le sabre, la lance, la baïonnette… Il utilisait les armes pour son entrainement personnel.
Pensez-vous que le travail des armes doit être intégré dans la pratique de l'Aïkido ?
On peut utiliser les armes lorsqu'on a atteint un certain niveau. Mais les débutants ne doivent pratiquer que le Taïjutsu. Il ne faut pas travailler les armes avant d'être familiarisé avec les techniques de l'Aïkido.
Est-il important de travailler les armes en Aïkido ?
Je ne crois pas. Aujourd'hui il y a de plus en plus de professeurs qui enseignent le ken mais dans le temps Osenseï se fâchait si on pratiquait trop le sabre. Il disait "L'Aïkido c'est le Taïjutsu alors étudiez profondément le Taïjutsu.".
(…) L'essence de l'Aïkido est le Taïjutsu, il faut garder cela à l'esprit. Mais on utilise le sabre pour apprendre le riaï, les principes.
(…) Osenseï n'aimait pas beaucoup que l'on pratique le ken. Il disait toujours "Pratiquez le Taïjutsu intensément !".
Saïto Morihiro (rapporté par Daniel Toutain)
"Si quelqu'un n'étudie que le travail à mains nues avec un professeur qui lui-même connaît les armes de l'Aïkido et les pratique, il étudiera forcément un Aïkido correct avec les bonnes formes de corps. Mais une personne qui pratique aussi les armes aura un travail plus beau et plus précis."
Sommaire
"Enseigner le sabre, c'est enseigner l'Aïkido", par Henri Avril
"L'escrime médiévale européenne", par Michel Biays
"De la nécessité de créer des liens", par Germain Chamot
"Shochikubaï no ken", par André Cognard
"Armes coréennes, influences et intégrations", par David Constant
"Le choix du bokken en Aïkido", par Jordy Delage
"Tobin Threadgill, le gardien du Takamura ha Shindo Yoshin ryu", par Nicolas Delalondre
"De l'art martial à la sûreté personnelle", par Elie Edme
"Les chroniques de Noro Masamichi (2)", par Pierre Fissier
"Daïfuku", par Laure Kié
"Forger son corps (Le corps du guerrier 2ème partie)", par Fabien Lespagne
"Aïkiken, le riaï ou la logique commune", par Eric Marchand
"Katsuninken, le sabre de vie", par Masato Matsuura
"Laïkike, le Iaïdo et l'Aïkido avec Nishio senseï", par Paul Muller
"Réflexions sur la pratique de l'Aïki et du sabre", par Malcolm Tiki Shewan
"Ame no ukihashi ken", par Régis Soavi
"10ème Nuit des Arts Martiaux Traditionnels", par Léo Tamaki
"Des fondements de l'Aïkiken à l'essence du Budo", par Daniel Toutain